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lundi, 26 février, 2024

Traverser la rue pour manger sainement

J’ai déjà démonté ici le cliché selon lequel « on vote avec son portefeuille » et on n’a qu’à traverser la rue pour soutenir son type d’agriculture préféré en achetant les produits qui en sont issus. Julien Denormandie, le précédent ministre de l’agriculture, avait ainsi justifié l’abandon des aides publiques au maintien en agriculture bio : c’était un segment du marché, l’État n’avait aucune raison de soutenir les préférences de consommation de tel ou telle. Ce genre de considération est une sorte de bingo particulièrement réussi de l’idéologie qui triomphe aujourd’hui, elle coche toutes les cases de ce que pensent les représentant·es les plus idiot·es de la petite bourgeoisie qui vote au centre ; elle a pour but de flatter dans le sens du poil leur méconnaissance du monde dans lequel ils et elles trimbalent leurs malheureuses existences. Je ne fais pas l’honneur à Emmanuel Macron de manger la même pâtée que celle qu’il donne à ses chiens. Ses sorties récentes sur le sujet sont le propos délibérément cynique d’un leader populiste. Je reprends donc, parce qu’il me semble important à plusieurs titres, le sujet à la faveur de l’actualité.

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lundi, 19 février, 2024

I'm so happy to see you

Les logiques du développement personnel se sont doucement imposées dans notre imaginaire. Les ouvrages qui ont envahi les rayons des librairies peuvent dispenser une grande sagesse, si possible orientale, ou enchaîner les conseils simples ou les lieux communs (charité bien ordonnée commence par soi-même). Offrant une façade lisse, ils ont un propos aussi varié que consensuel. Depuis quelques années les critiques s’attachent à cet objet protéiforme, en dévoilant les nombreuses influences derrière une apparence anodine. Le développement personnel tire ses origines d’une part d’un ethos libéral et méritocratique qui s’exprime assez frontalement en langue anglaise depuis au moins un siècle : tout le monde peut devenir riche, celles et ceux qui ne le sont pas n’ont pas su tirer profit de mes enseignements, que voici offerts à la vente. Les nouvelles pratiques spirituelles devenues plus visibles en Occident à partir des années 1960, mais qui elles aussi ont des racines profondes, en constituent le versant ésotérique.

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jeudi, 15 février, 2024

Une colère qui se tient sage

La récente mobilisation agricole a emmêlé tous les ingrédients qui caractérisent la France depuis son accélération illibérale : une pauvreté que le travail peine à résorber malgré les promesses renouvelées depuis 2007 de lui redonner sa « valeur » (morale, voire moralisatrice, mais jamais économique) ; la colère à laquelle donnent lieu ces promesses non tenues et le sentiment d’avoir été le dindon de la farce ; l’arbitrage systématique des gouvernements en faveur des classes dominantes.

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vendredi, 2 février, 2024

Chères collaboratrices

9782348077609.jpg, fév. 2024Sandrine Holin, Chères collaboratrices. Comment échapper au féminisme néolibéral, La Découverte, 2023, 240 pages, 19,50 €

Voici un livre dont on a envie de partager la lecture avec beaucoup d’amies et de camarades, en raison de son sujet qui en France reste assez rarement abordé. S’il est facile de mépriser certains féminismes, il est plus difficile en revanche de poser le doigt sur ce qui pose réellement problème. Ainsi du féminisme pour cadres sup qui a trouvé en Sheryl Sandberg, ex-dirigeante de Facebook et milliardaire, son égérie (voir ici une critique par bell hooks, citée dans Chères collaboratrices). Sandrine Holin, survivante du féminisme en entreprise, remonte à la source du phénomène.

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jeudi, 25 janvier, 2024

France Bullshit

Il y a quelques jours j’ai repéré une pub assez laide pour un entreprise avec un nom à la con. Un peu comme Assur2000 ou Charenton Clés. Passant et repassant devant pour aller prendre le métro (quand il est accessible), il m’a fallu un temps pour comprendre que France Services était une énième déclinaison de France Bullshit, cette refonte des services de l’État sous une marque à la syntaxe anglaise.

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jeudi, 28 décembre, 2023

Le Prix de la démocratie

prix-démocratie.png, déc. 2023Julia Cagé, Le Prix de la démocratie (2018), Folio, 2020, 629 pages, 10,90 €

Ces derniers jours, vous avez été assailli·es de propositions visant à contribuer à l’existence d’associations diverses et vous avez peut-être eu du mal à choisir entre toutes : celles qui surveillent l’état des droits humains et des libertés civiles en France, celles qui diffusent une information de qualité et font vivre des débats dignes, celles qui sont les seuls porte-paroles qu’a notre milieu naturel, etc. Si vous avez la chance d’être imposable, vous avez peut-être la satisfaction d’entraîner avec quelques euros la contribution de l’État à hauteur du double, la somme étant déduite de vos impôts. Satisfaction peut-être légèrement érodée par le rappel que les multimilliardaires que compte désormais la France font de même. À la différence qu’eux ne donnent ni à Lundi matin, ni à la Ligue des droits humains ou à la Quadrature du Net. Et qu’ils donnent beaucoup plus.

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jeudi, 21 décembre, 2023

L’extrême droite règne mais ne gouverne pas

Le trafiquant d’influence Darmanin-démission, par ailleurs ministre de l’intérieur, se flatte de ne pas avoir fait voter sa loi contre les personnes migrantes avec les voix de l’extrême droite. Cela m’évoque la situation suédoise à l'issue des élections de 2022. L’extrême droite suédoise, un parti d’origine néo-nazie bien nommé Démocrates de Suède (SD), est le deuxième plus gros groupe parlementaire (73 sièges) derrière celui du parti social-démocrate (107 sièges). Mais c’est le dirigeant d’un parti de droite ayant obtenu 68 sièges, Ulf Kristersson, qui dirige le gouvernement dans lequel sont entrés d’autres partis de droite ayant fait des scores de respectivement 5,34 et 4,61 %. À eux trois, ceux-ci ont réuni 30 % des voix et donc des sièges. Le gouvernement Kristersson est élu par 176 voix contre 173 grâce à un accord programmatique avec le SD. Celui-ci fait en outre partie d’un cabinet informel qui réunit les quatre partis et prépare les budgets endossés par la coalition de trois partis. Officiellement, l’extrême droite ne gouverne pas en Suède, elle se contente de régner.

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samedi, 16 décembre, 2023

Les gueux, restez chez vous !

Il l’a dit ou il ne l’a pas dit ? Le préfet d’Île-de-France n’a pas annoncé de confinement des habitant·es de la région pendant la durée des Jeux olympiques. Non. Il a simplement fait remarquer que les transports régionaux était tellement performants « qu’à certains endroits le plan de transport ne permet d’acheminer les spectateurs que si tous les autres voyageurs ou presque étaient dissuadés » de les prendre. Venant d’autorités si soucieuses de respecter les libertés civiles, ça fait un peu peur, même si le type n’a pas prononcé l’expression « confinement olympique ».

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samedi, 9 décembre, 2023

Nourrir la bête

« La magie Shiva n’a jamais été aussi accessible », apprend-on sur les publicités pour cette entreprise qui met à disposition du travail de ménage. « Shiva vous permet de faire le choix de régler la moitié de votre facture chaque mois en bénéficiant immédiatement de votre crédit d’impôt. » Ménage, garde d’enfants et même cours de musique à la maison font l’objet de publicités variées qui insistent toutes sur ce fait : c’est l’État qui paye la moitié !

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samedi, 4 novembre, 2023

Sous le parapluie trans

Je suis bénévole dans un festival de cinéma qui tient à une non-mixité aujourd’hui devenue moins courante. Alors que bon nombre d’espaces non-mixtes sont « sans mecs cis(genre) », soit adoptent une non-mixité queer, nous tenons à être un lieu pour « les femmes et les lesbiennes » (1). Depuis vingt ans que je connais le festival, toutes les femmes y sont les bienvenues, cisgenre ou transgenre. J’apprécie le fait que chaque groupe puisse bâtir un espace qui correspond à ses aspirations et que diverses définitions de la non-mixité cohabitent, qu’on ne standardise pas les pratiques militantes. Ce festival réunit des festivalières très diverses, de tous âges, venues de tout le pays, avec des positionnements politiques différents qui se frottent parfois. L’an dernier un tag sur le mur externe du lieu disait : « Festival transphobe ». Cette année ce sont des « lesbiennes pas queer » tout aussi courageuses et anonymes qui ont pris la parole de cette manière très déplaisante pour faire connaître leurs reproches. Ça veut peut-être dire que le festival n’est pas monolithique et ces attaques sont une reconnaissance de la diversité qui y a cours.

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Une histoire d’autoroute

En 2007, l’écologie avait enfin surgi comme un sujet politique légitime, après des décennies d’alertes ignorées. C’est cette année-là que je me suis engagée dans une lutte contre un projet d’aménagement, l’autoroute A65. Première autoroute de l’après-Grenelle de l’environnement, le projet aquitain, long de 150 km, supposait l’artificialisation de 1 500 hectares et la destruction de huit zones Natura 2000. J’avais rencontré à l’occasion un petit groupe de militant·es landais·es très attaché·es à leur coin de forêt et à leurs sept fontaines, à quelques dizaines de kilomètres de là où j’ai moi-même grandi.

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mardi, 3 octobre, 2023

Un pays qui aime le sport

Celles et ceux que fatigue l’overdose actuelle de sport ne sont pas au bout de leurs peines. La France macroniste est un pays profondément divisé politiquement et dans lequel les entrepreneurs en politique n’ont de cesse de nier à leurs adversaires la simple existence ou d’appuyer à leur profit sur tout ce qui clive (voir le récent usage de l’abaya, mot et vêtement inconnus de la plupart d’entre nous avant qu’un ministre n’en fasse LA menace contre sainte République, bien avant le démantèlement organisé des services publics). Cette France-là a bien besoin de sport, cet objet qui réconcilie à moindre coût, et Emmanuel Macron s’en empare avec enthousiasme. On se rappelle l’énarque vibrant de manière exagérée à la victoire de l’équipe de France en 2018 et sa silhouette exultante, pour une fois virile et hétérosexuelle, aussi vite répliquée sur le matériel promotionnel de l’Élysée. C’est bien là un usage politique, voire partisan, du sport mais on est tenu de respecter l’injonction paradoxale à une réconciliation programmée autour de l’équipe de France. Le président va pêcher un peu de popularité dans les stades ? Impossible de le huer, il représente la France. Il mène une politique assise sur une bien faible légitimité démocratique et sa Première ministre ne gouverne plus que par 49.3 ? Il est Mbappé ou Dupont, il est la France, taisez-vous.

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dimanche, 1 octobre, 2023

Tout plaquer

tout_plaquer_w.jpg, oct. 2023Anne Humbert, Tout plaquer. La désertion ne fait pas partie de la solution... mais du problème, Le Monde à l’envers, 2023, 72 pages, 5 €

Autour de vous, beaucoup ont peut-être choisi de déserter leur emploi dans le tertiaire pour en exercer un autre « qui a du sens » dans l’artisanat ou l’agriculture et sortir du salariat. Peut-être même faites-vous partie de ces déserteurs et déserteuses qui depuis quelques années font parler d’elles et d’eux, avec des pics d'attention inattendus.

Anne Humbert, ingénieure non déserteuse, a choisi de consacrer un livre au phénomène (encore un) mais celui-ci prend le parti de le critiquer, à partir d’échanges avec des ami·es ayant déserté et de lectures qui vont de la grande presse à des auteurs comme le sociologue Richard Sennet, critique de la standardisation du travail. Outre quelques articles, comme celui-ci dans Lundi matin, cette option reste à ma connaissance assez peu conventionnelle dans les milieux alternatifs plus ou moins radicaux subjugués par la notion de désertion (Reporterre a, selon Humbert, consacré vingt-et-un articles au discours des étudiant·es qui bifurquent d’AgroParisTech). Ces trajectoires ont suscité plus d’intérêt que le « refus de parvenir » auquel était consacré il y a quelques années un excellent bouquin, toujours disponible.

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mercredi, 13 septembre, 2023

Covid et punaises de lit

Un ménage sur dix aurait été confronté à la question des punaises de lit depuis 2017. Je n’en fais heureusement pas partie mais j’en ai fait la déplaisante expérience en voyage. Les morsures sont très douloureuses, bien que la douleur s’efface dans l’heure, et elles perturbent fortement le sommeil puisque ces bêtes trouvent refuge dans la literie (mais pas seulement) et préfèrent sortir dans l’obscurité. Un logement infesté, c’est un véritable cauchemar. Impossible de dormir sereinement, d’inviter chez soi des ami·es, à dormir évidemment mais aussi à prendre l’apéro sur un canapé (1). Ou alors à leurs risques et périls, ce qui accroît le risque pour les ami·es d’ami·es et ainsi de suite. Par certains aspects, cette question des punaises de lit me rappelle le Covid. Et j’ai longtemps été tentée d’y consacrer un billet, ce que je fais aujourd’hui, rattrapée par l’actualité.

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mardi, 12 septembre, 2023

Luttes LGBTI, luttes des classes ?

En mars 2023, j’ai été invitée par l’UNEF à m’exprimer à l’université Clermont-Auvergne dans le cadre du Festival étudiant contre le racisme et les discriminations. La soirée a commencé par l’intervention d’un membre des Inverti·es qui a présenté ce collectif très présent dans le mouvement contre la réforme des retraites et sa volonté d’inscrire les personnes LGBT en tant que telles dans le mouvement social, notamment en raison du fait que c’est à ce titre que beaucoup sont vulnérables économiquement.

J’ai enchaîné en apportant quelques précisions sur la préhistoire du mouvement LGBT (j’étais la plus âgée dans l’assistance, ayant eu 20 ans en 1997) et en abordant des questions qui me tiennent à cœur. J’étais venue avec deux livres très différents. Le premier, du journaliste espagnol Daniel Bernabé, s’intitule Le Piège identitaire, chroniqué ici, et porte sur la politique des identités sexuelles et raciales, trop souvent perçue comme subversive. L’expression politique de minorités sexuelles n’est pas en soi un danger pour l’ordre établi. Barnabé montre combien la social-démocratie démissionnaire a même utilisé ses réponses aux revendications de ces minorités pour se donner une caution de gauche qu’elle ne méritait plus en raison de ses politiques trop favorables au capital et néfastes aux intérêts des plus pauvres (parmi lesquel·les ces minorités sont par ailleurs surreprésentées, ce que note bien Bernabé). Pensons dans le contexte français au mariage pour tou·tes, seule réforme de gauche de Hollande, par ailleurs responsable de la loi travail, de la mort de Rémi Fraisse et d’une répression politique violente, des cars Macron et de l’adoubement de celui qui depuis six ans fait le marche-pied de l’extrême droite. Rétrospectivement, le mariage pour tou·tes, une réforme par ailleurs insatisfaisante aux yeux de communautés LGBT, a le goût amer d’un quinquennat déjà à droite.

livres-LGBT-classes.jpeg, sept. 2023

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dimanche, 10 septembre, 2023

Plantez des arbres !

arbre-sécheresse.JPG, sept. 2023Tout le monde aime les arbres. Même Macron. Et pour cause, en dehors de leur valeur intrinsèque, leurs bénéfices pour les êtres humains sont nombreux. En ville les arbres améliorent la qualité de l’air en capturant le CO2 et relâchant de l'oxygène. Ils apportent une ombre bien plus fraîche (1) que celle des « ombrelles » en béton qui les ont parfois remplacés (2). L’absence d’arbres et des espaces trop minéraux provoquent au contraire des îlots de chaleur insupportables lors des périodes caniculaires toujours plus nombreuses. Les arbres à feuilles caduques ont même le bon goût de se dévêtir l’hiver, quand les maisons ont besoin des apports du soleil pour se réchauffer, et c’est l’un des principes de l’architecture bioclimatique. Dans les prés et même les champs, la présence d’arbres protège de la sécheresse, apporte de l’ombre et du fourrage pour les animaux (les ruminants mangent aussi des feuilles), du bois dans les économies paysannes pour le chauffage ou la construction. Les recherches en agroécologie nous ont permis de mesurer les bénéfices de l’arbre jusque dans les champs. Certes ils compliquent le travail mécanique et réservent une partie de la surface, qui ne peut être cultivée. Mais globalement, il est établi que la présence d’arbres est un bénéfice y compris en matière de production végétale et là encore les canicules à venir ne feront que les accroître en comparaison avec les terres sans arbres, plus sujettes à la sécheresse et dont l’attrait paysager est par ailleurs bien faible. Les forêts, en revanche, apportent fraîcheur et variété des espèces vivantes (3). Les paysages arborés fournissent un plaisir qui va jusqu’à l’émerveillement mais qui disparaît devant une monoculture à perte de vue. Partout la présence d’arbres contribue à l’entretien de populations d’insectes pollinisateurs ou non, au maintien de la vie. Et au niveau global, les arbres ont les mêmes avantages de captation du CO2 et leur rôle dans la régulation des gaz à effet de serre est bien connu. Dans les forêts tropicales, la plantation d’arbres nourriciers au milieu des arbres qui ont poussé spontanément ainsi que la chasse d’animaux forestiers ont permis à de nombreux peuples, comme à Bornéo, de vivre dans cet écosystème. La déforestation sur tous les continents de larges pans de forêt met en jeu leur survie… et à terme, la nôtre.

IMG_1329.JPG, sept. 2023

Photos : En septembre 2022 en Loire-Atlantique, l'herbe n'est restée verte que sous un grand arbre. Pendant une très chaude journée d’été dans le Lot-et-Garonne, des animaux d’élevage se regroupent à l’ombre des arbres. Ombre portée en été sur la façade d’un mas provençal par un micocoulier.

mas-micocoulier.jpeg, sept. 2023

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mercredi, 30 août, 2023

Eux ou nous

« Nous sommes les 99 %. » C’est une expression et une analyse que je n’ai jamais trop appréciées. Nous serions ainsi, tou·tes autant que nous sommes, cadres sup et crève la dalle, soumis·es aux diktats du capitalisme. Et personne parmi nous, oh non, n’en serait le prisonnier volontaire, bien content·e de profiter de toutes les marchandises qu’il offre. Quand j’entends « 99 % », je repense à ce militant communiste montrant à ses potes les photos de ses vacances au Vietnam avant la réunion de la gauche unie post-2005. Je l’imagine aujourd’hui conduisant un SUV, ce type de voiture encore peu répandu il y a dix ans et que l’industrie automobile n’a pas spécialement promu avant de se rendre compte de la force de la demande – demande par ailleurs tirée entre autres par le sentiment (et la réalité) de la moindre sécurité face aux SUV des personnes qui conduisent des voitures de taille plus raisonnable (1). Ou comment un objet énergivore et idiot s’est imposé via le marché (y compris les marchés publics) et contribue à verrouiller notre futur.

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mercredi, 16 août, 2023

Greenwashing

greenwashing.png, août 2023Aurélien Berlan, Guillaume Carbou et Laure Teulières (dir.), Greenwashing. Manuel pour dépolluer le débat public (2022), Points Seuil, 2023, 243 pages, 8,90 €

L’an dernier paraissait un ouvrage collectif, manuel d’auto-défense intellectuelle contre le capitalisme vert et ses stratégies de greenwashing. Coordonné par trois chercheur·es de l’Atelier d’écologie politique de Toulouse, ce livre réunit 35 auteurs et autrices aux profils divers (recherche, journalisme, activisme) pour 24 entrées : agriculture durable, finance verte, écocitoyenneté, etc. J’ai été sollicitée pour une entrée sur l’écopsychologie, parmi quelques unes qui portaient moins sur des stratégies de greenwashing que sur des fausses solutions aux désordres écologiques. Greenwashing est aujourd’hui accessible en poche, c’est l’occasion de se le procurer.

mardi, 15 août, 2023

Toxic Data

toxicdata.jpg, août 2023David Chavalarias, Toxic Data. Comment les réseaux manipulent nos opinions (2022), Champs Flammarion, 2023, 290 pages, 10 €

Il y a une quinzaine d’années, je traînais dans une méchante revue écologiste qui publiait encore des articles énamourés sur les médias sociaux, synonymes de démocratie. Maintenant que tout le monde pouvait savoir (savoir quoi ?), le peuple était au pouvoir et tout irait pour le mieux. Les pires plumes de la revue étaient restées scotchées sur un imaginaire datant de quinze ans de plus (le web comme espace nécessairement décentralisé donc démocratique) sans arriver à tirer les conclusions des premiers mouvements sociaux Facebook, comme la révolution iranienne manquée de 2009 qui donna au contraire le loisir aux autorités d’exercer une répression féroce sur les comptes ayant relayé le message des manifestations.

À l’époque il me semblait seulement que ces niaiseries péchaient par excès d’optimisme, confondant savoir et pouvoir, révolte et concertation, se faisant des illusions sur l’horizontalité produite par Internet et sur sa capacité subversive. La droite de l’époque et cette gauche radicale technophile avaient en commun le rêve qu’Internet produise une société sans corps intermédiaires, la première en connaissance de cause pour mieux gouverner et la seconde par manque de vision politique et utopisme mal digéré. Voilà ce que j’écrivais à ce sujet en plein surgissement des printemps arabes et peu avant le mouvement des places. Eh bien je me trompais. C’était bien pire ! C’est ce que nous explique cet ouvrage publié en poche cette année.

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mercredi, 28 juin, 2023

Les classes dominantes sont-elles vraiment écolos ?

Voici le texte d’une rencontre tenue à Grenoble dans les locaux d’Antigone avec les Amis du Monde diplomatique le 22 mai 2023. Par « classes dominantes » j’entends dans la première partie de mon propos ces classes qui ont un capital, économique, social ou culturel, qui leur permet de dominer symboliquement les classes qui en sont moins dotées sans pour autant déterminer l’action des États ni avoir un pouvoir économique qui leur permet de peser sur l’ordre des choses.

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