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samedi, 23 janvier, 2021

Condamner le viol pour renforcer la culture du viol

Ça arrive comme ça, d'un coup, et ça prend tout le monde par surprise. Alors certes il y a des secousses qui font espérer que… et puis non. Ou plus tard. Matthieu Foucher était parti « à la recherche du #MeTooGay » en septembre 2020 mais celui-ci est arrivé quatre mois plus tard, télescopant le #MeTooInceste qui venait d'exploser. Nous voilà donc scrollant les deux hashtags et likant à tour de bras, espérant signifier notre reconnaissance et donner un peu de courage à celles et ceux qui en ont déjà beaucoup. On vous croit, on est derrière vous, vous n'avez rien à vous reprocher. C'est leur faute.

Et puis régulièrement un compte masculin débarque et explique que le mieux à faire, contre les violences sexuelles, c'est de tuer, torturer, mutiler leurs auteurs. Aussi paradoxal que cela puisse paraître, ce genre de comportement appartient pleinement à la culture du viol. Si vous aussi ça vous met mal à l'aise, c'est pour ça.

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dimanche, 16 août, 2020

Le mal que nous nous faisons (deuxième partie)

Je suis une féministe de Twitter. J'exprime en ligne mes idées, mes espoirs et mes indignations, sur mon fil et celui d'autres, parfois en espérant convaincre des anti-féministes partageant leurs préjugés. J'ai rencontré en ligne d'autres autrices, d'autres féministes mais la plupart du temps nous ne faisons que nous croiser. Plus ou moins poliment : il m'arrive même de poser de véritables questions pour mieux comprendre les motivations des un·es et des autres mais elles restent sans réponse.

Heureusement, j'ai connu mieux : une socialisation militante dans des groupes ou petites organisations, le plus souvent en non-mixité, y compris avec d'autres féministes dans un mouvement généraliste mixte. Nous étions camarades. Ces années-là m'ont nourrie, politiquement et intellectuellement, humainement aussi. Et je les regrette. Est-ce moi qui ai changé et suis devenue un esprit chagrin ? Ou le féminisme ? Il m'est encore arrivé de me répandre en public sur l'énergie extraordinaire éprouvée en non-mixité, et que l'autrice avec laquelle nous partagions une rencontre tempère un peu mes propos… oui, c'est vrai que ces derniers temps, être féministe a moins été une suite d'enthousiasmes qu'un chapelet de déceptions.

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jeudi, 11 juin, 2020

Le Genre du capital

Céline Bessière et Sibylle Gollac, Le Genre du capital, La Découverte, 2020, 336 pages, 21 €

L'adhésion aux constats que dressent les féministes est souvent compliquée par ce fait que les femmes et les hommes vivent ensemble et s'aiment : deux époux de sexe opposé, un père sa fille, une sœur son frère. Le racisme, les haines de classe peuvent advenir quand des groupes sociaux sont séparés, ne se connaissent pas ou peu et admettent des intérêts divergents mais le sexisme, vraiment ? Vraiment. C'est le tableau que dressent Céline Bessière et Sibylle Gollac dans leur ouvrage Le Genre du capital, résultat de deux décennies de recherches (fois deux) sur comment deux moments importants de la vie économique des personnes, l'héritage et le divorce, appauvrissent les femmes en comparaison aux hommes. Au point que les inégalités de patrimoine entre femmes et hommes sont passées de 9 % en 1998 à 15 % moins de vingt ans plus tard. Celles-ci tiennent en partie à la place des femmes dans le monde du travail, domaine arpenté depuis quelques décennies par des sociologues féministes et dont les autrices rappellent rapidement quelques aspects. Les femmes en couple avec des enfants travaillent 54 heures par semaine dont seulement 20 sont rémunérées. Les hommes 51 dont 33 sont rémunérées. La répartition des richesses, elle aussi inégalitaire, tient à ce facteur mais également à d'autres moins connus et moins bien compris, que Bessière et Gollac mettent en lumière dans leur livre.

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lundi, 11 mai, 2020

Féminisme : le clash des générations ?

Il y a quelques mois, une jeune féministe prenait acte d'un désaccord que nous avions en le mettant sur le compte de nos générations différentes. Ce jour-là j'ai regardé dans le miroir mes rides naissantes et mes trois cheveux blancs de quadragénaire relativement bien conservée et j'ai respiré un grand coup. Je suis en cours de péremption.

J'ai pris parti dans un débat qui opposerait « jeunes féministes » queer pour qui l'identité de genre est un fait individuel, je suis qui je veux, y compris une licorne ou un dragon de Komodor (sic) (1), et « vieilles féministes » pour qui le genre est une invention patriarcale et qui finissent par dire que c'est le sexe biologique qui détermine la position sociale. C'est le genre de débat particulièrement intéressant où on a le choix entre deux positions caricaturales et largement caricaturées. Les secondes seraient en cheville avec l'extrême droite nord-américaine (celle-ci étant 100 % hostile à la liberté d'avorter, l'argument me paraît foireux mais j'imagine en effet les milieux réacs se frotter les mains à l'idée de tirer parti de ces polémique et soutenir, s'ils aiment jouer au billard, cette partie-là) et les premières mèneraient la controverse à force d'intimidation et de sabotages de l'expression publique des secondes (Twitter, universités et bibliothèques) et de coups dans la vraie vie (et ça, à ma connaissance, c'est avéré).

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jeudi, 27 février, 2020

Le mal que nous nous faisons (première partie)

Il y a quelques années, j'animais la bibliothèque d'un centre de femmes. Nous avions choisi de mettre dans notre enfer (l'endroit des livres sulfureux qu'on ne peut se procurer qu'en les demandant explicitement) une bande dessinée qui racontait la vie et des engagements d'une féministe « historique ». Notre principale raison, c'est qu'elle parlait de manière très désinvolte du viol subi par une femme de ménage dans une chambre d'hôtel, comme s'il ne s'agissait pas d'un crime. Nous ne voulions pas laisser une lectrice qui aurait subi ce genre de violence découvrir cette parole méprisante. Mais il faut le dire, j'avais aussi un peu en tête les accusations qu'on faisait à cette dame d'être une féministe blanche bourgeoise qui n'était pas trop sortie d'elle-même et avait gardé le genre comme unique grille de lecture des relations de pouvoir dans notre société. Une des copines du groupe avait lu le livre en question mais je ne m'étais pas donné cette peine.

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mardi, 3 décembre, 2019

La Révolution féministe

La Révolution féministe, Aurore Koechlin, Amsterdam, 2019, 170 pages, 12 euros

Aurore Koechlin est une jeune chercheuse en sociologie du genre qui livre ici un premier livre prometteur, à la fois petite histoire du féminisme et réflexion sur les perspectives du mouvement. C'est ambitieux… mais c'est réussi. L'ouvrage commence avec une quarantaine de pages consacrées à l'histoire des mouvements féministes, les trois fameuses vagues : mouvements suffragistes au début du XXe siècle, libération des femmes dans les années 1970 (pour la France), mouvements d'inspiration queer ou black feminist enfin, le tout assez centré sur la France mais à l'écoute des autres mondes qui contribuent à la fabrication du féminisme hexagonal. L'autrice poursuit en nous apprenant qu'une quatrième vague est en train de se former. Elle en dresse les contours, en reprend la principale question à ses yeux, celle de l'exploitation des femmes en tant que classe mais appartenant également à d'autres, et propose une stratégie féministe capable de passer entre quelques écueils pour prendre nos maux à la racine.

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lundi, 15 juillet, 2019

Mixité choisie : une histoire de chiottes

Parmi les armes de défense du féminisme, avec la dérision et la sororité, figure la non-mixité. Se priver des mâles lumières de nos camarades ou de leurs bras musclés a bien des avantages : entre femmes, notre parole prend enfin la place qu'elle mérite et nous nous révélons puissantes, bien plus que ce que les rôles sociaux qui nous sont dévolus nous laissaient imaginer. Pour certaines, la non-mixité est un moment de prise de conscience, de ressourcement, de questionnement libre, sans pression externe, des agendas féministes. Pour d'autres, il s'agit de mener des vies séparées, autant que possible, de la classe des hommes, perçus comme agresseurs et exploiteurs. L’idée est alors d'assurer le respect de son autonomie ou de son intégrité.

Les enseignant·es aussi s'interrogent sur les bienfaits de la non-mixité pour protéger les filles de l'ambiance masculine que les garçons imposent si vite, de même qu'ils monopolisent l'attention de leurs profs. Est-ce le signe d'une régression, d'un retour au temps des tabliers et des écoles de filles, avec des enseignements différenciés accompagnant des rôles de genre rigides et hiérarchisés ? La non-mixité fait enrager quelques universalistes persuadé·es que des valeurs communes de justice sociale suffisent à assurer l'égalité entre nous. Ainsi que certains proféministes convaincus d'avoir assez « déconstruit » leur masculinité ou trahi la classe des hommes pour mériter que leur place soit partout, y compris dans des groupes de femmes qui souhaitent un moment de répit.

La non-mixité fait causer et depuis quelques années celle des toilettes est en débat. « Whatever, just wash your hands! » : c'est le mot d'ordre de la libération des stéréotypes de genre dans les toilettes. Les pictogrammes stupides, figure neutre pour les hommes et en robe pour les femmes, sont remplacés par des licornes ou des dragons de Komodo. Au-delà des cercles militants queer, l'idée fait son chemin chez les décideurs, président·es d'université ou des États-Unis, qui rendent les toilettes neutres ou autorisent l'accès aux toilettes du sexe de son choix sur les bases de l’auto-déclaration. Voilà qui a de quoi séduire.

La suite sur papier et sur ce blog dès septembre. À noter, que ce numéro d'été, plus épais et qui sera en kiosque pendant deux mois, est bien au prix de 5 euros...

dimanche, 26 mai, 2019

La Conjuration des ego

conjuration.png, mai 2019Aude Vidal, La Conjuration des ego. Féminismes et individualisme, Syllepse, 2019, 96 pages, 7 €
Parution octobre 2019

Et si l'individualisme et le libéralisme, qui déterminent si fortement nos manières de considérer le monde, faisaient aussi dériver les mouvements politiques engagés pour la justice sociale et l'émancipation ? Après avoir soumis à cette question les « alternatives » écologistes, Aude Vidal interroge les nouveaux féminismes radicaux. Le renouveau que connaît aujourd'hui le mouvement semble également le déborder sur ses marges : prostitution, inclusion des femmes trans et des personnes non-binaires, difficile articulation avec les pensées queer et décoloniales sont l'occasion d'autant de frottements. Ringard et étriqué, le féminisme hérité de la deuxième vague ? Ou bien le foisonnement des féminismes d'aujourd'hui ne serait-il pas l'occasion de dérives libérales ? L'auto-détermination et la reconnaissance d'un troisième genre, non-binaire, ne nieraient-elles pas le genre comme rapport sociaux de sexe, en faisant une caractéristique individuelle ? Le féminisme du choix, en postulant que tous les choix effectués librement par des femmes sont des choix féministes, n'est-il pas devenu le point de rencontre entre féministes libérales et nouvelles féministes radicales ? Comment accueillir ces questions qui renouvellent le féminisme, souvent de manière stimulante ou salutaire, sans rien céder sur la défense des femmes et de leur intégrité ?

mercredi, 8 mai, 2019

« Women’s march » à Kuala Lumpur

Femmes, LGBT : malaise en Malaisie

À Kuala Lumpur, la marche des femmes du 9 mars a été interdite par les autorités. Ça n’a pas empêché une joyeuse troupe d’activistes féministes et LGBT de manifester, secouant un peu les mœurs d’un pays bigrement conservateur. Reportage paru dans le journal CQFD d'avril 2019.

Illustration Caroline Sury.

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mardi, 5 mars, 2019

Le hijab, la ministre et le marche-pied

La scène avait choqué le monde entier : trois hommes et une femme forcçaient une femme à se déshabiller en public. Elle était venue profiter des plaisirs de la plage mais son habillement ne correspondait pas aux valeurs de la France – le bikini ? La semaine dernière, des ministres libérales de La République en marche ont repris le flambeau en accusant la firme Décathlon de vendre des hijabs sportifs incompatibles avec leurs valeurs féministes. C'est bientôt la Saint Patrick et il y aura dans les rues plein de mecs bourrés avec des chapeaux verts démesurés. Je n'aime pas ces chapeaux mais dans mes valeurs figure le droit de mettre ce qu'on veut sur la tête, quand bien même ça piquerait les yeux des autres. Si l'activisme des ministres ne mérite qu'une moquerie, il faut dire un mot sur la réception globalement favorable qui lui a été réservé.

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dimanche, 12 août, 2018

Une machine à fabriquer de l'impuissance

Ces derniers mois, je suis allée à la rencontre des lecteurs et des lectrices d'Égologie. J'ai parfois eu un peu la frousse, comme dans cette petite ville démocratique où les affiches de la rencontre avaient été arrachées ou ailleurs quand la veille de la rencontre est sortie une tribune enflammée contre la couverture du livre dans un média local. Mais globalement, ça s'est bien passé. Mieux que ça, même. J'ai rencontré une foule de gens estimables, des camarades pour qui les alternatives écolo posent depuis longtemps problème mais qui n'avaient pas forcément su l'exprimer dans des termes audibles par les personnes qui y sont engagées et ces mêmes personnes, ou en tout cas celles qui y croient vraiment, à la solidarité et au reste, pour qui Égologie a été l'occasion de questionner leurs pratiques et qui l'ont accepté de bon gré. À tou·tes : merci pour l'accueil !

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dimanche, 4 mars, 2018

Un proféminisme toxique

Comme beaucoup de féministes, j'ai appris (dans la douleur) à me méfier des hommes qui se présentent comme des alliés. De mes engagements associatifs à des discussions avec des inconnus, la fréquentation d'hommes prétendant lutter contre le sexisme, les inégalités et les violences qu'il entraîne, a porté tort à mon engagement à moi, exigeant de ma part une attention qui aurait pu plus utilement être employée sur d'autres sujets, sabotant mon travail ou s'attaquant à mon intégrité. D'où vient donc que des hommes qui prétendent apporter leur contribution à ces luttes puissent y participer de manière si toxique ?

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lundi, 29 janvier, 2018

Féminisme : à qui sont ces bas instincts ?

Ces derniers mois ont été l'occasion d'en entendre de belles. Un chef de l'État qui s'inquiète de la « délation » alors que l'impunité est plus flagrante que d'imaginaires « dérives » d'une parole libérée : les viols et crimes sexuels sont très peu reportés (environ un sur dix) et encore moins punis (un ou deux sur dix d'un sur dix). Si l'État a un cœur de métier (1), c'est de refuser l'impunité des attaques contre les personnes et c'est justement parce qu'il ne fait pas son boulot que celles et ceux qui luttent contre les violences en appellent au jugement du public.
Une critique d'art, visiblement pas grande logicienne, qui regrette de ne pas avoir été violée pour montrer qu'elle aurait été la même (tellement supérieure aux autres femmes) si son histoire avait été très, mais alors très différente.
Des patriarches gaulois qui persistent à mettre sur le même plan séduction et crime sexuel, parlant au choix de malentendu ou de continuum dans la relation si complexe entre hommes et femmes, voyez-vous… alors que nous féministes persistons à leur dire que la violence n'est pas une relation (de même qu'une bêche dans le crâne n'est pas du jardinage).

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samedi, 21 octobre, 2017

Idéal standard

Aude Picault, Idéal standard, Dargaud, 2017, 152 pages, 17,95 euros

Claire a 32 ans et elle rêve de rencontrer l’homme de sa vie. Cette infirmière en néonatologie, un peu conformiste et un peu complexée, a des airs de madame Toutlemonde, c’est un personnage un peu fade qu’on a croisé mille fois dans la presse féminine ou les séries états-uniennes. On la voit multiplier les aventures amoureuses dans l’espoir de rencontrer le bon. Passant du mec qui répugne à s’engager mais qu’elle croise deux mois plus tard très en couple au supermarché à celui qui lui demande de partir le matin comme si elle était la femme de ménage ou qu’elle avait fini de s’occuper de la plomberie (1), Claire est en train de baisser les bras quand arrive le prince charmant, une barbe de trois jours qui bosse dans la finance et fait beaucoup d’efforts pour la séduire. Fin du premier acte, tout ne fait que commencer.

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vendredi, 29 septembre, 2017

Quand les hommes m'expliquent

Rebecca Solnit, Men Explain Things to Me, Haymarket Books et Dispatch Books, 2014

La scène se passe lors d'une soirée très classe. Un monsieur qui a réussi sa vie demande à une écrivaine de quarante ans de quoi causent ses livres et à peine a-t-elle commencé à lui dire le sujet de son dernier qu’il commence à bavasser en s’étonnant qu’elle n’ait pas lu LE bouquin sur le même sujet, paru la même année, qu’il connaît si bien et entreprend de lui expliquer… son bouquin à elle, finit-elle par comprendre. Comment expliquer un livre à son auteure. Pourquoi un tel désir de dominer l’autre en lui assénant son savoir, même quand on est un ignorant ? Cette soif de domination qui s’empare parfois d’hommes qu’on croyait mieux élevés, et qui osent parce qu’il ne s’agit au fond que de mots, Rebecca Solnit la replace dans le continuum de la violence faite aux femmes. Refuser d’entendre, qu’il s’agisse de la volonté des femmes de participer à la conversation au même titre que les hommes (1) ou qu’il s’agisse d’un « non », participe selon elle de la même violence, à des degrés divers. Car longtemps les femmes n’ont pas été jugées des « témoins fiables de leur propre vie » et encore moins du reste de l’expérience humaine, et c’est encore cette idée à laquelle nous nous heurtons chaque jour.

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samedi, 20 mai, 2017

Limites de la bienveillance

L’an dernier le succès de la notion de bienveillance interrogeait mon mauvais esprit. Depuis, cette notion a pris encore plus de place dans l'espace public. De l'éducation positive au développement personnel, la bienveillance a envahi jusqu'aux discours militants, dans un large spectre qui va des plus radicaux/ales aux bénévoles de la campagne Macron. Certes, écrivais-je, « la bienveillance, ce pourrait être cette manière d'être ensemble sans s'user, sans se faire trop de mal les un-es aux autres, pour continuer à militer, faire venir du monde et ne pas se retrouver avec trois warriors et deux tondus dans des rangs clairsemés ». Mais, alors que l’injonction à la bienveillance devenait omniprésente, j’avais l’impression d’un comportement dont il n’était plus question d’interroger le sens, d'une véritable norme qui n’était plus (seulement) un moyen de renforcer les rangs des militant-es en cultivant entre eux et elles des liens plus positifs, contre l'usure ou contre la violence qui irrigue ces milieux (1). Au nom de la bienveillance, valeur observée à Nuit debout, je notais par exemple qu’il n’était plus possible de huer à l’ancienne un type venu servir un discours de préférence nationale. À quoi servait donc la bienveillance si ce n’était plus une qualité relationnelle à construire entre camarades mais une obligation sociale, un genre de droit humain dû même aux fachos ?

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mardi, 7 mars, 2017

C’est à ça que servent les féministes !

« Mademoiselle », « nom de jeune fille »… au-delà du caractère symbolique qu’a le renvoi systématique des femmes à leur statut marital, faire jongler les femmes avec plusieurs noms leur porte préjudice en compliquant leurs démarches administratives et en étant source d’erreurs. Rencontre avec l’une des petites mains d’un chantier de refonte des sites administratifs qui permettent d’effectuer des démarches en ligne. Elle est ergonome et développeuse mais également féministe et blogueuse.

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samedi, 2 juillet, 2016

Signé : un homme qui ne se laissera rien arracher

Il y a quelques semaines, dans une exposition des affiches féministes recueillies par le collectif La Rage, j'ai eu le désagrément de voir posé le message que voici

au-dessus de l'affiche que voilà.



Non pas à côté mais au-dessus, cachant en partie l'affiche.

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lundi, 2 mai, 2016

On a les utopies qu'on mérite : la bienveillance


Militante féministe, j'ai participé à construire ou animer des lieux bienveillants. Et j'ai évité ceux où ne se posaient pas les mêmes exigences. Une réunion sans tours de parole, que ce soit dans la vieille gauche ou chez les anars spontanéistes, me semble une perte d'énergie considérable. Attachées à saisir un ton de phrase qui annoncerait la fin d'une intervention, les grandes gueules ont depuis longtemps arrêté d'écouter ce qui se dit pour se donner une chance de prendre la parole au vol. Une situation de guerre sourde qui, en plus de baisser la qualité de la communication et de mettre une pression accrue sur les participant-e-s, nous prive des idées portées par des personnalités différentes (pas forcément des femmes, j'ai déjà vu un copain partir en disant que de toute façon il n'avait rien d'intéressant à dire alors que j'avais déjà pris la parole plusieurs fois). Je vais jusqu'à éviter les lieux où la parole est distribuée de cette manière, même quand le programme a l'air intéressant.

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mardi, 23 février, 2016

Les personnes les premières concernées

On parle beaucoup des « personnes les premières concernées » mais rarement des « deuxièmes concernées ». J'ai déjà écrit à ce sujet : les prostituées sont certes les personnes les premières concernées par leur activité mais la prostitution et sa reconnaissance gravent dans le marbre la disponibilité des femmes aux hommes, du male entitlement à la culture du viol. Les autres femmes sont elles aussi concernées par ce que fait la prostitution à la société qui la réprime ou qui l'accepte (sachant que la France fait les deux, réprimant des prostituées dont elle soumet le revenu à l'impôt).

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