mardi, 23 octobre, 2018
Par Aude le mardi, 23 octobre, 2018, 09h04
Mona Chollet, Sorcières. La Puissance invaincue des
femmes, La Découverte/Zones, 2018, 240 pages, 18 euros
Ce n’est pas pour rien que la chasse aux sorcières est souvent située à tort
au Moyen Âge et attribuée, à tort également, à un bas peuple aveuglé par
l’ignorance. C’est parce que c’est un exploit qui fait moche sur la carte de
visite des élites européennes, en grande partie laïques et universitaires, qui
ont accusé des femmes de tous âges (1) de se frotter la vulve sur des balais
volants et d’entretenir des rapports charnels avec le diable… des accusations
délirantes portées par de si sérieux messieurs.
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dimanche, 18 mars, 2018
Par Aude le dimanche, 18 mars, 2018, 09h23
Nicolas Rouillé, Timika, Anacharsis, Toulouse, 2018,
492 pages, 22 euros.
« Western papou », prévient la couverture. Timika, cette ville de
Papouasie occidentale située dans les environs de la plus grande mine d'or du
monde, a en effet des airs de ville-frontière pourrie par la corruption, le
fric de l'or qui ruisselle tant bien que mal, pourrie enfin par cette guerre
méconnue que l'Indonésie mène contre les Papous. Si aujourd'hui ce grand
archipel épouse parfaitement les frontières des Indes néerlandaises, une
création coloniale, cela n'a rien d'une évidence car la Nouvelle Guinée est une
île peuplée de Papous, peuple mélanésien et chrétien. Sa partie occidentale a
été rattachée de force à l'Indonésie dans les années 1960, suite à une annexion
forcée et à un référendum sous contrôle, avec la complaisance de la communauté
internationale. Jakarta mène depuis lors une guerre pour garder le territoire
dans son giron. Car, qu'il s'agisse de bois ou de métaux, l'île est aussi riche
en matières premières que ses habitant·es sont pauvres.
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samedi, 21 octobre, 2017
Par Aude le samedi, 21 octobre, 2017, 10h44
Aude Picault, Idéal standard, Dargaud,
2017, 152 pages, 17,95 euros
Claire a 32 ans et elle rêve de rencontrer l’homme de sa vie. Cette
infirmière en néonatologie, un peu conformiste et un peu complexée, a des airs
de madame Toutlemonde, c’est un personnage un peu fade qu’on a croisé mille
fois dans la presse féminine ou les séries états-uniennes. On la voit
multiplier les aventures amoureuses dans l’espoir de rencontrer le bon. Passant
du mec qui répugne à s’engager mais qu’elle croise deux mois plus tard très en
couple au supermarché à celui qui lui demande de partir le matin comme si elle
était la femme de ménage ou qu’elle avait fini de s’occuper de la plomberie
(1), Claire est en train de baisser les bras quand arrive le prince charmant,
une barbe de trois jours qui bosse dans la finance et fait beaucoup d’efforts
pour la séduire. Fin du premier acte, tout ne fait que commencer.
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mardi, 19 septembre, 2017
Par Aude le mardi, 19 septembre, 2017, 17h42
Nicholas Carr, Remplacer l'humain.
Critique de l'automatisation de la société, traduit de l'anglais
(États-Unis) par Édouard Jacquemoud, 272 pages, 19 euros, L'Échappée,
2017
Résister à l’automatisation, voilà une entreprise qui semble insensée. Ce
serait résister à la logique selon laquelle les investissements dans les
machines sont très vite plus rentables que le recours à du travail humain (et
que l’argent décide de la marche du monde). Ce serait résister également à
notre goût pour l’économie de moyens, une tendance presque naturelle à s’éviter
de la peine. Il est toujours possible de s’en désoler à longueur de pages, de
la documenter de manière intéressante mais à quoi bon ? Nicholas Carr
réussit pourtant à livrer avec Remplacer l’humain un livre
passionnant.
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lundi, 13 juin, 2016
Par Aude le lundi, 13 juin, 2016, 11h06
La Fabrique pornographique, Lisa Mandel d'après Mathieu
Trachman, Casterman, Sociorama, 2016, 168 pages, 12 euros
Mathieu Trachman avait livré en 2013 Le Travail pornographique. Enquête sur
la production de fantasmes (La Découverte). C'est d'après cette enquête
que Lisa Mandel, dessinatrice et scénariste, inaugure une collection de bandes
dessinées d'inspiration sociologique, Sociorama. On attend au tournant celle
qui est avec Yasmine Bouagga co-directrice de la collection. Côté adaptation,
on appréciera ou pas le parti pris qui consiste à ne pas livrer un récit
documentaire – c'est le choix de beaucoup d’œuvres qui trouvent désormais leur
place en album ou dans les revues (1) – mais une fiction très bien documentée.
On suit ses personnages, une femme et un homme, novices comme il se doit, dans
leur découverte de l'industrie porno. Et dans leur désaffection finale puisque
les carrières féminines sont brèves (« un an pour un chien c'est sept ans
pour un humain [et] dans le porno c'est pareil »). L'héroïne, une jeune
femme à l'apparence éloignée des stéréotypes de hardeuse (cheveux courts et
poitrine de taille modeste) fait ainsi l'objet d'un engouement à son arrivée
dans l'industrie puis se range au bout d'une année, quand ses fantasmes sont
taris et que « les salaires […] stagnent ». Avec 14 mois en moyenne
pour une carrière féminine, pas de temps pour construire un métier avec des
revendications corporatives, comme le suggèrent deux personnages féminins à la
fin du livre, rappelant qu'aux USA les acteurs et actrices porno sont
organisé-e-s en syndicat. Il y aurait pourtant de quoi, comme on l'apprend au
fil d'un récit réaliste, qui laisse la part aux fantasmes de cette industrie
tout en en éclairant les zones d'ombre.
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mardi, 24 mai, 2016
Par Aude le mardi, 24 mai, 2016, 17h19
La Démocratie aux champs, Joëlle Zask
Les Empêcheurs de penser en rond/La Découverte, 2016
252 pages, 18,50 euros
Dans une tradition où « politique » (du grec polis) et
« citoyen » (soit citadin) disent le caractère urbain du fait
démocratique, quelle est la place des ruraux et plus particulièrement de la
paysannerie ? Le mépris dans lequel ont longtemps été tenu-e-s les
paysan-ne-s (1) semble avoir fait obstacle à leur participation politique.
Quand les révolutionnaires choisissent le suffrage censitaire et la
représentation,
deux dispositions anti-démocratiques, l'argument selon lequel le peuple est
en grande partie composé de paysan-ne-s trop courbé-e-s sur la terre pour avoir
des aspirations politiques un peu élevées légitime la dépossession qui s'opère
alors. Joëlle Zask livre donc un ouvrage utile qui redonne ses lettres de
noblesses aux personnes qui cultivent la terre, en tant que classe sociale (2)
et en tant qu'individus.
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mardi, 12 avril, 2016
Par Aude le mardi, 12 avril, 2016, 17h07
Le Syndrome
du bien-être, Carl Cederström et André Spicer, traduction Édouard
Jacquemoud, L'Échappée, 2016, 168 pages, 15 euros
Préféreriez-vous être riche et en bonne santé ou pauvre et malade ?
Bien-être et prospérité économique se conjuguent comme si l'un appelait
l'autre, à moins que ce ne soit le contraire. Pendant que des « athlètes
d'entreprise » se voient offrir jusqu'à leur poste de travail les
conditions matérielles de leur bien-être, tant physique que psychique, les
losers de la guerre économique ne pourront s'en prendre qu'à eux-même pour
leurs muscles flasques et leur teint blafard. Ce ne sont plus des inégalités
criantes, ce n'est que justice…
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mardi, 5 avril, 2016
Par Aude le mardi, 5 avril, 2016, 16h52
Refuser de
parvenir. Idées et pratiques, Centre international de recherches sur
l'anarchisme (CIRA) de Lausanne, Nada et CIRA, Paris et Lausanne, 2016, 300
pages, 20 euros
Voici un bouquin qui devrait faire écho chez les militant-e-s qui se sont posé
la question de l'articulation entre leurs engagements et leur vie
professionnelle. Peut-être pas les cadres supérieurs qui trouvent quelques
heures par mois pour leurs loisirs associatifs et font exactement les mêmes
carrières que leurs collègues qui votent PS. Plutôt à ceux et celles qui se
sont posé la question de comment être utiles et ont fait des choix de vie en
fonction. Le livre commence fièrement avec le rappel de l’œuvre d'Albert
Thierry, brillant étudiant choisissant le métier de maître d'école alors que
des fonctions d'enseignement plus prestigieuses lui sont ouvertes. C'est lui
qui théorise le « refus de parvenir » qui fait l'objet de ce recueil.
Principaux objectifs : ne pas trahir sa classe et travailler à une
émancipation qui ne soit pas individuelle mais collective. Le refus de parvenir
n'est pas le choix solitaire d'une belle âme mais une stratégie politique
visant une amélioration des conditions de travail et de vie de toute une classe
sociale. L'égalité des chances (de parvenir) ne les intéresse pas, ils et elles
visent une égalité des conditions.
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jeudi, 17 mars, 2016
Par Aude le jeudi, 17 mars, 2016, 16h44
Matthew Crawford, Contact. Pourquoi nous avons perdu le
monde, et comment le retrouver, La Découverte, 2016, 283 pages, 21
euros
Il est question d’Emmanuel Kant et de Walt Disney, de philosophie politique et
de machines à sous. Crawford manie des concepts philosophiques parfois un peu
ardus mais toujours éclairés par des exemples concrets, l’idée étant de
comprendre pourquoi, dans un univers toujours plus commode, nous nous trouvons
toujours plus désemparés. L’exemple qui m’a le plus frappée est celui des vieux
Disney, dans lesquels les personnages sont aux prises avec des objets qui
répugnent à leur obéir, au point de sembler animés d’une vie propre : des
ressorts qui ne cessent de se détendre, des portes de s’ouvrir… Aujourd’hui,
dit-il, les dessins animés de la même firme montrent des personnages béats
servis par des machines complaisantes. Je me demande quelles intrigues ce
dispositif peut servir. L’absence de conflit, outre qu’elle est assez pauvre
politiquement, l’est aussi sur le plan narratif.
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jeudi, 31 décembre, 2015
Par Aude le jeudi, 31 décembre, 2015, 13h58
Une chronique à retrouver sur le tout nouveau site de L'An
02.
Sophie Bessis
La Double Impasse. L’Universel à l’épreuve des fondamentalismes religieux
et marchand
La Découverte, 2014
240 pages, 19 €
Deux visions inconciliables du monde : la démocratie libérale d’un
côté, avec son individualisme bon teint, et de l’autre une doctrine passéiste,
à la violence médiévale. Les deux se seraient heurtés de plein fouet lors des
événements de 2015. Dans cet ouvrage publié quelques mois plus tôt, Sophie
Bessis renvoie dos à dos ce qu’elle appelle la « théologie de
marché » (ne parle-t-on pas de « dogme » néo-libéral ?) et
le fondamentalisme religieux, protestant et musulman au premier chef. Il ne
s’agit pas selon elle d’un choc des civilisations mais du désarroi d’un monde
livré à un monstre à deux faces qui se nourrissent l’une l’autre, un monde au
bord de l’épuisement écologique et où les idées émancipatrices peinent
désormais à se faire entendre. Le développement ne signifie plus que
l’intégration au capitalisme mondialisé, l’argent passe au rouleau compresseur
la diversité du monde. Les traités transatlantique et transpacifique proposent
de peaufiner l’arsenal juridique global pour la prédation des ressources
publiques par les intérêts privés. Les mondes musulmans, du Mali à l’Indonésie,
sont uniformisés par la magie des pétrodollars. La mondialisation est là, et
bien là, mais l’universalisme recule. Ne restent que les identités : celle
des Charlie qui bravent les barbares en levant leur verre, oubliant l’état de
délitement de leur « démocratie », gouvernement représentatif aux
abois depuis que l’ordre néolibéral s’est imposé depuis Chicago ou
Bruxelles ; celle de ceux et celles qui ne sont plus désormais que des
musulman-e-s.
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mardi, 29 décembre, 2015
Par Aude le mardi, 29 décembre, 2015, 15h09
Alain Deneault
Gouvernance. Le Management totalitaire
Lux, Montréal, 2013
200 pages, 12 €
et
La Médiocratie
Lux, Montréal, 2015
224 pages, 15 €
Les discussions sur la démocratisation des structures de gouvernement, sur des
modalités comme la reddition des comptes, les modes de scrutin plus «
représentatifs », le tirage au sort de certaines assemblées, etc. semblent à
côté de la plaque à la lecture d’Alain Deneault. Comme si nous retardions de
quarante ans. Depuis, la gouvernance a su imposer sa façon d’envisager l’action
publique comme un dialogue fructueux, orchestré par l’État, entre ce qu’on
appelle les acteurs : vous, moi, à partir du moment où nous sommes concerné-e-s
par les projets à mettre en œuvre. Mais aussi (et surtout), dans le cas d’un
projet d’aménagement par exemple, Vinci ou Eiffage, qui sont bien les plus
concernées au regard des budgets qu’elles vont mobiliser. On comprend mieux les
« ratés » de la bonne gouvernance occidentale, les autoroutes et autres grands
projets construits contre les textes de loi, contre l’avis des services du
ministère et des associations écologistes ou de riverains qui dénoncent le
gaspillage d’argent public.
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mercredi, 19 août, 2015
Par Aude le mercredi, 19 août, 2015, 10h16
Chris Harman, Une histoire populaire de l'humanité. De
l'âge de pierre au nouveau millénaire
Traduit par Jean-Marie Guerlin, La Découverte Poche, 2015 (2011)
720 pages, 15 €
«
On me demande souvent, disait Howard Zinn,
s'il existe un
livre équivalent à mon Histoire populaire des États-Unis
pour
l'histoire du monde. Je réponds toujours qu'il n'en existe qu'un qui
accomplisse cette tâche particulièrement délicate : celui de Chris
Harman. »
Une histoire populaire de l'humanité, par un
auteur spécialement attentif aux mouvements révolutionnaires, donne l'occasion
de revenir sur des moments marquants de l'histoire sociale et politique, plus
compréhensive envers les classes laborieuses et les révolté-e-s de toute sorte,
moins attachée au grands hommes qui semblent ailleurs seuls capables de faire
se mouvoir des foules inertes (1).
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lundi, 20 juillet, 2015
Par Aude le lundi, 20 juillet, 2015, 16h15
Brut. La Ruée vers l’or
noir, David Dufresne, Nancy Huston, Naomi Klein, Melina Laboucan-Massimo
et Rudy Wiebe, Lux éditeur, Montréal, 2015, 108 pages, 12 €
Du brut. Par millions de barils. Ou comment donner à voir l’exploitation des
sables bitumineux du Canada. Barils, dollars, gaz à effet de serre, degrés de
réchauffement… On connaît l’histoire mais voici une invitation à en découvrir
jusqu’aux acteurs les plus modestes, en un livre composite où se mêlent
reportage, témoignage, plaidoyer et littérature, et autant de voix. Fort
McMurray, dans le Nord-Est de l’Alberta, est la capitale de ces hydrocarbures
que l’on dit non-conventionnels : leur exploitation, plus polluante et
plus coûteuse que partout ailleurs, souille 90 000 km2 de terres et le bassin
du fleuve Mackenzie, l’une des principales sources d’eau douce au monde. Dans
des mines à ciel ouvert, des camions de trois étages chargent ce mélange de
sable, d’argile et de bitume. Moins visible, l’exploitation par forage consomme
plus d’eau et relâche plus de produits toxiques. Le transport par pipe-line,
ensuite, déverse lors de fuites régulières des millions de litres jusque dans
l’océan Pacifique.
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mardi, 31 mars, 2015
Par Aude le mardi, 31 mars, 2015, 13h19
Sandrine
Rousseau, Manuel de survie à
destination des femmes en politique, Les Petits Matins, 2015, 108 pages,
9,90 €
Voilà un ouvrage qui s’adresse à toutes les femmes qui pourraient
être tentées par l’action publique. Mais même si vous n’avez pas envie de
devenir un jour conseillère municipale ou présidente de région, même si vous
pensez comme moi que les élections devraient être abolies car la manie de la
représentation est en soi un problème, même si vous n’avez pas envie de
partager le pouvoir mais de le voir disparaître, ne passez pas votre chemin.
Car le pouvoir existe toujours et vous êtes de toute manière susceptible d’y
être confrontée un jour. Si ce n’est pas dans votre activité militante,
heureusement à l’abri de tout rapport de pouvoir entre femmes et hommes
(non ?), ce sera au boulot, avec des proches ou dans la rue.
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lundi, 23 mars, 2015
Par Aude le lundi, 23 mars, 2015, 14h33
Barbara Ehrenreich
et Deirdre English, Sorcières,
sages-femmes & infirmières. Une histoirE des femmes soignantes,
traduction L. Lame, Cambourakis, collection « Sorcières », 2015, 124
pages, 16 €.
En 1973, Barbara Ehrenreich et Deirdre English publient une
brochure féministe, à mi-chemin entre le pamphlet et l’ouvrage de vulgarisation
historique, dont le succès les surprendra. Les éditions Cambourakis reprennent
aujourd’hui ce texte, accompagné de deux introductions par les autrices (1973
et 2010) et d’une postface, le tout constituant un ouvrage modeste mais
stimulant. Que celles qui comme moi n’ont pas encore osé ouvrir Caliban et la sorcière (1) n’hésitent
pas.
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mardi, 17 mars, 2015
Par Aude le mardi, 17 mars, 2015, 17h01
La
Tyrannie des droits
Brewster Kneen
Écosociété, Montréal, 2014
traduit par Daniel Poliquin
168 pages, 15 €
Quand la question du mal-logement surgit pour la énième fois dans les médias en
2007, la réponse politique qu'elle reçoit est juridique : il s'agit d'un
droit au logement opposable (DALO), le droit de demander un logement social
auquel s'ajoute, quand celui-ci n'est pas accordé dans les douze ou
vingt-quatre mois, le droit de poser un dossier en préfecture et le droit de
recevoir une réponse dans les trois mois. Celle-ci peut être négative, hein,
parce que les logements en question, on ne va pas les inventer. Lutter contre
la spéculation immobilière, la hausse des loyers et la disparition de logements
du marché, construire des logements sociaux, voilà qui constitue une politique
susceptible de rendre justement disponibles et accessibles ces logements.
Qu'est donc alors le droit au logement opposable, s'il ne garantit rien aux
personnes qui ont besoin de se loger et n'y arrivent pas par leurs seuls
moyens ? A celles et ceux qui se posent la question, au-delà du contexte
hexagonal, la lecture de
La Tyrannie des droits sera d'un grand
secours pour aider à poser un regard renouvelé sur cet objet emblématique de
notre modernité.
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mercredi, 11 mars, 2015
Par Aude le mercredi, 11 mars, 2015, 16h20
Sherry Turkle, Seuls ensemble. De plus en plus de technologies,
de moins en moins de relations humaines (2011), traduit par Claire
Richard, L’Échappée, 2015, 528 pages, 22 euros
Sherry Turkle prend
soin de le préciser tout le long de son ouvrage. Non, elle n'est pas luddite
(du nom de ces ouvrier·e·s briseurs de machine s'étant donné pour chef un
imaginaire Ned Ludd). Non, elle n'est pas technophobe. Et de fait, le propos de
cette psychologue directrice de département au Massachussets Institute of
Technology est assez mesuré. Elle essaie de comparer chacune de ses
observations avec nos usages d'avant le surgissement de machines high
tech : qu'est-ce qui change entre une poupée et un robot social dans
la réaction d'un enfant ? entre un échange sur Skype et une lettre pour
les personnes mises en relation ? Et ses conclusions ne sont pas
fracassantes, inédites ou catastrophistes. Mais oui, quelque chose change quand
nous nous entourons d'objets nouveaux, avec des fonctionnalités nouvelles. Nous
nous y adaptons, ils suscitent en nous des comportements différents, qui nous
sont peut-être dommageables. Dans une institution qui réunit les meilleurs
ingénieurs au monde, voilà assez d'esprit critique pour donner des
palpitations…
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mercredi, 27 août, 2014
Par Aude le mercredi, 27 août, 2014, 11h11
Groupe Marcuse, La
Liberté dans le coma. Essai sur l'identification électronique et les motifs de
s'y opposer, La Lenteur, Paris, 2012, 256 pages, 11 €.
Partant de la question de l'identification électronique, le groupe Marcuse nous
proposait une brève histoire de la société industrielle et des réflexions
stratégiques sur les moyens à notre disposition pour la mettre à mal. C'était
il y a bientôt deux ans, mais la relecture s'impose.
Faire l'histoire de l'identification, de la marque, du code-barre, c'est
rappeler la nécessité toujours accrue de gestion du troupeau humain (en
commençant par les criminels et les ouvriers pour finalement généraliser le
régime) et de ses approvisionnements. Nous sont ainsi rappelées la lente
invention de l'ordinateur pour répondre aux besoins de gestion des données
démographiques, la naissance du numéro de Sécu – sous Vichy, le numéro
commençant par 3 pour les Juifs/ves, soit sous les mêmes circonstances que
l'INRA qui plus tard imposerait la numérotation de l'ensemble du cheptel – ou
de la marque commerciale, destinée à assurer les profits en écoulant de la
marchandise bon marché et de piètre qualité, en créant ce que d'aucun-e-s
pourraient appeler sans rire du « lien social » entre êtres humains
et images publicitaires.
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mardi, 19 août, 2014
Par Aude le mardi, 19 août, 2014, 08h51
La Reproduction artificielle de
l’humain, Alexis Escudero, Le Monde à l’envers,
2014.
« En privilégiant le construit sur le donné, les gender studies entendaient s'affranchir des
pesanteurs charnelles et naturelles, au prétexte qu'elles servaient presque
toujours de paravent à la domination. La démarche conduit à une impasse. Elle
revient à négliger, voire à mépriser le vécu de l'incarnation, c'est à dire
l'expérience subjective du corps, celle de la vie vivante. »
La citation s'étale sur la plus grande partie de la page 195 de
La
Reproduction artificielle de l'humain, aussi impressionnante que
l'autorité de Jean-Claude Guillebaud qui l'a écrite. Guillebaud le pape du
féminisme, l'auteur de nombreux ouvrages consacré à la domination
masculine ? Non, Guillebaud le journaliste chrétien à qui le mouvement des
femmes ne doit rien,
ancien directeur du
centre François-Mauriac sur présentation d'une paire de testicules (quatre
directeurs en 28 ans, quatre grands hommes) mais qui à n'en pas douter aime
beaucoup les femmes comme
Gérard Longuet : il en a peut-être une, quatre filles et quand il a un
chien, c'est une chienne. La démarche conduit à une impasse, prière d'en
changer à la demande du mâle qui n'a aucun, mais alors aucun intérêt dans cette
affaire et ne jouit d'aucun, mais alors aucun privilège sur la question. Air
connu.
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lundi, 14 avril, 2014
Par Aude le lundi, 14 avril, 2014, 14h23
Radicalité. 20 penseurs vraiment critiques, coordonné par Cédric Biagini, Guillaume Carnino et Patrick
Marcolini, L'Échappée, 2013, 432 pages, 25
€

Tout est dans le vraiment, dans ce projet éditorial à deux faces.
La première est la plus évidente et consiste à présenter vingt penseurs et
penseuses, issuEs de différentes traditions politiques et intellectuelles, qui
offrent de la société où nous vivons une critique en profondeur (radicale) en s'attaquant
aux causes des maux actuels. La critique est d'ordre économique, technique,
culturel et politique, éclatant les fronts et
prenant au sérieux des registres qui ont pu apparaître comme secondaires : la
technique n'est pas le problème, ça dépend de ce qu'on en fait ; la culture est
affaire d'usages et de représentations individuelles, qui n'ont pas lieu d'être
jugées à l'aune politique sauf à entraîner l'accusation de discours
moralisateur.
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