Casser le thermomètre

« Vous avez remarqué, personne ne porte de masque. Les gens ont l’air en forme... » C’est donc que la pandémie est terminée, disait le président états-unien le 18 septembre. Une pandémie est terminée quand les indicateurs le montrent, pas quand les autorités abandonnent toute mesure de précaution et que cela donne l’impression au public que tout va bien. Mi-juillet de cette année, en France, c’était l’équivalent de deux cars par jour qui se crashaient en tuant des malades du Covid, pour presque un million de nouveaux cas par semaine mais il était surtout question de partir en vacances sans aucune mesure de précaution dans les transports en commun, avec l’injonction de tout oublier pour bien dépenser. Ce que l’on peut retenir de la sortie tautologique de Joe Biden, c’est avant tout que les dirigeants ont envie que la crise sanitaire soit finie, quelque soit la réalité des faits.

Le meilleur moyen pour vivre dans le monde de ses rêves, c’est de casser le thermomètre d’une réalité qui ne vous agrée pas. Et en ce moment il semble que tout soit fait pour minimiser le nombre de cas signalés. Par exemple, l’arrêt de travail Covid, c’est bientôt fini, celui qui vous permettait de prendre autant de jours que durait votre isolement, sans période de carence. Je ne sais pas pour vous mais pour moi l’arrêt maladie c’est l’unique raison de signaler un cas pour une maladie dont les formes les plus répandues sont asymptomatiques ou ne se traitent pas. C’est d’ailleurs ce que j’observe autour de moi : pas de boulot, pas de test, pas de cas (même si par ailleurs les personnes s’auto-testent). S’il s’agit de perdre deux jours de revenu pour pouvoir se mettre en arrêt, j’imagine donc le nombre de cas baisser singulièrement.

Autre bris de thermomètre, le test payant pour les personnes non-vaccinées. C’est une réalité que j’ignorais, jusqu’à ce que, sans mon pass vaccinal en poche, j’ose demander un test en pharmacie alors que je suis cas contact. Pas de pass, pas de test gratuit, pas de cas. J’en parlais dès le 13 mars 2020 : en matière de maladie infectieuse, la discrimination au soin sur quelque groupe que ce soit est une atteinte à la santé de tou·tes. C’est une invitation à laisser circuler un virus sous les radars, donc sans action sur lui.

Voilà qui serait simplement pitoyable si le Covid ne tuait personne, s’il ne provoquait chez personne d’incapacité à long terme, si aucune vague n’était attendue pour l’hiver. Car il est plus facile de faire sortir le dentifrice que de le remettre dans le tube et c’est pareil avec le mercure des thermomètres (2).

(1) « If you notice, no one’s wearing masks. Everybody seems to be in pretty good shape, and so I think it’s changing, and I think this is a perfect example of it. » Joe Biden dans l’émission 60 Minutes au salon de l’auto de Détroit.
(2) Il n’y a plus de mercure dans les thermomètres depuis la fin des années 1990.

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